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Le régime juridique des intempéries dans l BTP


En cas d'intempéries, l'entrepreneur peut avoir l'obligation d'indemniser ses salariés et n'a pas nécessairement le droit de prolonger les délais d'exécution du contrat. Les cahiers des clauses administratives générales (CCAG) usuels prévoient cependant des règles offrant une certaine protection, que les cahiers des clauses administratives particulières (CCAP) peuvent venir compléter. Le point sur le régime juridique des divers cas d'intempéries.


Comment le Code du travail définit-il les intempéries ?

L'article L. 5424-8 du Code du travail dispose que les intempéries sont « les conditions atmosphériques et les inondations lorsqu'elles rendent dangereux ou impossible l'accomplissement du travail eu égard soit à la santé ou à la sécurité des salariés, soit à la nature ou à la technique du travail à accomplir ».


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Quelles sont les conséquences d'une intempérie pour les parties à un marché de travaux ?

L'entrepreneur peut décider d'arrêter le travail après consultation du comité social et économique, sous réserve que, dans les marchés publics, le représentant du maître d'ouvrage sur le chantier ne s'y oppose pas (art. L. 5424-9 du Code du travail).


Il appartient alors à l'entrepreneur de verser à ses salariés une indemnité journalière d'intempéries (IJI) quels que soient le montant et la nature de leur rémunération, dès lors que ces mêmes salariés ont accompli au moins 200 heures de travail dans les deux mois précédant l'arrêt de travail chez un ou plusieurs employeurs du BTP (art. L. 5424-10, L. 5424-12 et D. 5424-11).


L'IJI est versée au salarié à l'échéance normale de la paie dans les mêmes conditions (art. L. 5424-13). Le paiement de l'IJI doit être effectué jusqu'à la reprise du travail, qui est décidée par l'employeur ou par le représentant du maître d'œuvre sur le chantier (art. D. 5424-21).


Comment est calculé le montant de l'indemnité journalière d'intempéries (IJI) ?

L'IJI est due au salarié pour chaque heure perdue en raison des intempéries, à partir de la deuxième au cours d'une même semaine ou au cours d'une période continue d'arrêt.


La limite d'indemnisation est fixée aux trois quarts du salaire. Le nombre maximum d'heures de travail pouvant être indemnisé est fixé à neuf heures par jour dans la limite de 45 heures par semaine. Le nombre maximum des IJI susceptibles d'être attribuées au cours d'une année civile est fixé à 55 (art. L. 5424-12 et D. 5424-12 à D. 5424-14).


L'entrepreneur peut se faire indemniser des IJI versées aux salariés par la caisse de congés payés. Comment calculer le montant remboursable ?

En trois étapes. D'abord, on calculera un coefficient égal au rapport entre deux éléments (art. D. 5424-25 et D. 5424-36) : le montant des salaires servant de base à la cotisation intempéries versée par l'entreprise à la caisse de congés payés ; et ce même montant, déduction faite d'un abattement fixé à 80 244 euros pour la période du 1er avril 2019 au 31 mars 2020 (arrêté du 28 août 2019, NOR : MTRD1917637A) et qui serait de 81 204 euros entre le 1er avril 2020 et le 31 mars 2021 selon les publications du CIBTP.


Ensuite, on multipliera ce coefficient par le montant des indemnités intempéries versées aux salariés.


Enfin, on appliquera au produit de la multiplication précitée un taux de :

- 85 %, lorsque la masse salariale de l'entrepreneur dépasse trois fois le montant de l'abattement précité ;

- 90 %, lorsque ladite masse salariale est au plus égale à trois fois le montant de ce même abattement (art. D. 5424-26) ;

- 10 %, quel que soit l'entrepreneur, pour les six premières heures indemnisées suivant l'heure de carence (art. D. 5424-27).

L'employeur doit adresser le bordereau de déclaration d'arrêt de travail et la demande de remboursement des IJI versées aux salariés à la caisse des congés payés dans un délai d'un mois à compter de la reprise du travail, à peine de forclusion (arrêté du 18 février 2003, NOR : SOCF0211686A).


En cas d'intempéries, les délais d'exécution du marché peuvent-ils être prolongés ?

Les intempéries peuvent être considérées comme un cas de force majeure dès lors qu'elles auraient constitué un événement qui aurait empêché la poursuite de l'exécution des relations contractuelles, à la condition de remplir trois conditions cumulatives. Cet événement doit :

- échapper au contrôle du maître d'ouvrage ;

- ne pas avoir pu être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat ;

- et produire des effets qui n'auraient pas pu être évités par des mesures appropriées.


En cas de force majeure, l'entrepreneur est fondé à demander la suspension de l'exécution du marché pendant la période des intempéries. Le décompte des délais d'exécution du contrat est alors suspendu et ne continuera à courir qu'à la reprise des travaux. Les parties peuvent même convenir de la résolution du contrat si le retard résultant de la suspension le justifie. La résolution est acquise de plein droit si la poursuite des relations contractuelles est définitivement empêchée (art. 1218 du Code civil).


Qu'en est-il lorsque les intempéries ne constituent pas un cas de force majeure ?

Il pourrait être envisagé que l'entreprise se prévale d'une situation d'imprévision, en soutenant que les intempéries constitueraient un changement de circonstances suffisamment imprévisible pour que les parties puissent renégocier les délais du marché et, en cas d'échec des pourparlers, demander au juge l'adaptation du contrat ou même sa résolution (art. 1195 du Code civil). Encore faut-il que le contrat ne l'ait pas expressément exclu et que cette situation d'imprévision puisse être démontrée. A défaut, l'entreprise n'aurait probablement pas droit à une prolongation des délais d'exécution, sauf à ce que le contrat prévoie le contraire - ce que font les cahiers-types couramment utilisés dans les marchés de travaux.


En marchés publics, que prévoit le CCAG travaux ?

Dans le cas d'intempéries définies par le Code du travail, le CCAG travaux - applicable aux marchés publics qui s'y réfèrent - prévoit que les délais d'exécution sont prolongés pendant une durée égale au nombre de journées réellement constaté au cours desquelles le travail a été arrêté du fait des intempéries. S'il y a lieu, le nombre de journées d'intempéries prévisibles indiqué dans le cahier des clauses administratives particulières du marché doit être défalqué (art. 19.2.3). Le CCAG travaux renvoie aux CCAP la fixation du régime juridique des autres intempéries susceptibles d'entraver l'exécution des travaux (art. 19.2.3).


Que prévoit la norme Afnor NF P 03-001 de 2017 pour les marchés privés ?

Ce CCAG applicable aux marchés privés de travaux de bâtiment qui s'y réfèrent dispose que les journées d'intempéries prolongent le délai d'exécution du contrat pendant une durée égale à ces mêmes journées (art. 10.3.1.1.1).


Il précise que les journées d'intempéries sont celles définies par le Code du travail, ainsi que « celles pour lesquelles une impossibilité technique découlant des intempéries a été constatée par le maître d'œuvre, et notamment dans le cas où les conditions d'accès ou le respect des règles élémentaires de sécurité ne peuvent pas être normalement assurés ».


Quelles précisions inscrire dans les CCAP ?

Il est prudent de prévoir :

- les différents cas d'intempéries en fonction du lieu d'exécution des travaux et des prestations à exécuter, notamment pour le froid, le gel, la neige, les précipitations, le vent et/ou la température ;

- le nombre de journées d'intempéries prévisibles qui ne pourra pas justifier une prolongation des délais d'exécution du marché ;

- la prolongation des délais d'exécution pendant une durée égale à celle du nombre de jours d'intempéries, déduction faite des journées d'intempérie prévisibles précitées ;

- les preuves à apporter par l'entrepreneur pour justifier des cas d'intempéries (par exemple, peuvent être demandés un bulletin d'une station météorologique déterminée, un constat contradictoire entre l'entrepreneur et le maître d'œuvre par l'emploi d'outils tels qu'un anémomètre, etc. ).


De quelle façon sont décomptées les journées d'intempéries pour calculer la prolongation des délais d'exécution ?

La norme Afnor NF P 03-001 dispose que sont comptés les jours où le travail est arrêté. Quant au CCAG travaux, il fait de même mais ajoute, pour les intempéries définies par le Code du travail, les samedis, dimanches et jours fériés ou chômés survenus pendant la période d'intempérie.


Afin d'éviter toute contestation, il peut être recommandé d'indiquer dans les CCAP que les intempéries sont décomptées en jours ouvrables.


Selon quel formalisme les délais peuvent-ils être prolongés en cas d'intempéries ?

En principe, par avenant. Toutefois, le CCAG travaux prévoit que les délais puissent être prolongés par un ordre de service (OS) qui récapitule les constatations faites et en fixe la durée (art. 19.2.3). Sauf stipulation contraire du CCAP, l'entrepreneur doit notifier ses réserves sur un tel OS dans un délai de 15 jours calendaires à compter de sa réception, sous peine de forclusion (art. 3.8.2).


L'entrepreneur a-t-il droit au paiement d'une indemnité par le maître d'ouvrage en cas d'intempéries ?

Aucune indemnité n'est prévue, sauf, selon le CCAG travaux (art. 18.3) et la norme Afnor NF P 03-001 (art. 9.2), pour les pertes, avaries et dommages qui auraient été constatés et signalés immédiatement à l'autre partie en cas de force majeure.

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